CfP: Travailleurs et travailleuses enfermé·e·s

1. July 2023
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Appel à contribution pour le volume 2024 des Cahiers de l'Association pour l'Etude de l'Histoire du Mouvement Ouvrier (AEHMO). Argumentaire Si aujourd’hui aucun doute ne subsiste sur la possibilité pour le système capitaliste de s’accommoder de formes de travail contraint, la question de ses rapports avec ce dernier mérite d’être plus amplement examinée. En Suisse, aux 19e et 20e siècles des milliers de personnes ont été contraintes de travailler dans un contexte d’enfermement. Elles étaient emprisonnées sur une décision d’une autorité judiciaire ou internées par une instance administrative, ou encore placées avant leur majorité dans une institution dite d’éducation. Différents types d’asiles ont aussi promu des formes de rééducation par le travail, qui cachaient de fait une contrainte mal déguisée. À la faveur des récentes recherches sur les établissements psychiatriques, d’internement, de rééducation au travail, d’exécution des peines et des mesures, ce numéro des Cahiers de l’AEHMO proposera de s’intéresser aux travailleurs et travailleuses enfermé·e·s en Suisse et ailleurs entre les 19e et 20e siècles en suivant quatre axes d’analyse. Le premier posera à nouveaux frais la question de la rééducation/réhabilitation au travail par le travail, ou la fonction du travail dans la resocialisation. Que ce soit dans les prisons ou dans d’autres établissements qui visaient la transformation de la population enfermée, le travail a joué un rôle dit « éducatif » par l’inculcation au quotidien de savoir-être davantage que de savoir-faire. Discipline, rigueur, obéissance (voir soumission) étaient les qualités indispensables à l’individu productif dont le travail devait être le vecteur, tel que l’envisageaient les réformateurs sociaux et les responsables politiques. Dévier de ce profil impliquait le risque pour des milliers de personnes sans ressource de perdre leur liberté. Quelles étaient les pratiques concrètes de ces programmes de rééducation ? Quelle évolution peut-on retracer dans la (longue) durée ? Ou quels liens peut-on établir avec des politiques sociales actuelles dites de (ré)activation des personnes au chômage ou bénéficiant de l’aide sociale, ou encore en situation de handicap ? De plus, le travail devait assurer une part du financement, comment cet impératif de rentabilité se conjuguait-il avec les objectifs de réhabilitation ? Les travaux consacrés à la prison ou aux dispositifs de privation de liberté montrent que le traitement varie selon le sexe des individus visés. Que peut-on dire des différences de travail en situation d’enfermement entre les femmes et les hommes ? En Suisse, le travail agricole a occupé une grande part des hommes enfermés avec l’idée que cette activité recèlerait des vertus réparatrices en suivant l’adage, « qui se penche sur la terre se relève », pour citer un ancien directeur de l’établissement de Witzwil, plus vaste exploitation agricole helvétique. Comment la productivité et les dispositions à développer chez les sujets varient-elles selon leur sexe et les représentations de genre des personnes responsables de leur enfermement ? Quelle est la place du travail industriel de ce dispositif ? Les pratiques de mise au travail dans ce secteur changent-elles significativement pour les hommes et les femmes ? Qu’en est-il des possibilités de formations offertes aux personnes enfermées ? Les recherches sur le système carcéral étatsunien analysent l’émergence d’un véritable business des prisons dont le travail constitue une des dimensions. Pour se prévaloir du label « made in the USA », certaines firmes délocalisent leur production dans les prisons, plutôt qu’à l’étranger, car la main-d’œuvre y est encore moins chère. Sans aucune protection syndicale, très peu capable de s’organiser pour défendre ses conditions de travail, cette force de travail constitue une population particulièrement vulnérable. La question se pose également pour la Suisse et l’Europe sous une forme un peu différente, notamment celle des asiles industriels qui produisaient des biens pour des firmes externes. Ces pratiques, parfois justifiées par une vocation philanthropique, ont subsisté pendant une partie du 20e siècle, notamment parce qu’elles permettaient de couvrir les frais d’entretien des pensionnaires. Quelle est l’évolution du financement par le travail dans le modèle économique des établissements ? Quelles autres formes de sous-traitance ont existé dans différents types d’établissements à la population captive ? Comment ces dispositifs ont-ils évolué au cours des 19e et 20e siècles ? Comment peut-on les inscrire dans l’histoire du développement du capitalisme ? Enfin, un quatrième axe traitera des résistances au travail contraint de personnes enfermées et aux possibilités de mobilisation pour les faire connaître et éventuellement réclamer leur abolition. Des témoignages de personnes concernées, puis dès les années 1970, des collectifs ont dénoncé l’exploitation dans les prisons et les maisons d’éducation. Quelles autres formes de mobilisation ou de dénonciation ont existé ? Comment pensaient-elles le travail en situation d’enfermement ? Envoi des propositions Les propositions de contributions sont à envoyer à alix.heiniger@unifr.ch et à frederic.deshusses@slnd.net au plus tard le 1er juillet 2023. La décision parviendra aux auteur·e·s avant le 1er août. La première version des articles devra être soumise le 1er décembre au plus tard et sera discutée lors d’une rencontre le 16 janvier 2024 avec l’ensemble des auteur·e·s et les responsables du numéro. Une nouvelle version tenant compte des propositions de modifications devra parvenir à la rédaction au plus tard le 1er mars 2024.
Organised by
AEHMO, Alix Heiniger, Frédéric Deshusses

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Alix Heiniger

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French

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